En illustration, les deux autres gravures reproduites par Pierre Palpant d'après l'édition originale des Deux cousines.
C'était pourtant bien parti. Le jour même de la publication de cette huitième devinette, Mathieu X. avait déjà identifié le roman chinois dont le titre traduit était proposé dans sa formulation française des Deux cousines comme étant le Yu Jiao Li 玉嬌梨. C'était le plus facile. J'en avais, en effet, déjà parlé ici et là où je fournissais une illustration qui devait lever les dernières hésitations, et avait promis de rendre, un jour prochain, justice au traducteur Abel-Rémusat (1788-1832) en mettant en exergue ses avis sur la traduction des romans chinois - j'y travaille.
Il ne restait plus qu'à trouver le signataire de cette lettre dans laquelle celui-ci avoue son engouement pour ce roman. Lui aussi avait fait l'objet d'un billet, mieux, d'une devinette, la cinquième qui vous avait tenu en haleine au début de l'été [Voir ici et là]. Et puis, depuis dix jours, plus rien ! Alors, ne perdons plus de temps, il s'agissait (à nouveau) de Heinrich Heine (1797-1856) qui avait écris cette lettre de Potsdam, le 5 juin 1829.
Certes, L.D. l'avait deviné grâce, a-t-elle avoué, à Gallica2 qui propose une édition française de la correspondance de Heinrich Heine [Correspondance inédite. Paris : Michel Lévy Frères, 1866. Voir page 38/39 du livre ou 45/46 du document pdf], mais elle avait eu la délicatesse de ne révéler que le prénom de l’auteur ; Mathieu, de son côté, avait fait preuve d'une grande perspicacité en postulant que le rédacteur avait écrit en allemand, et de persévérance en proposant le peintre autrichien Koloman Moser (1868-1918), dit Kolo, comme destinataire possible.
Certes, L.D. l'avait deviné grâce, a-t-elle avoué, à Gallica2 qui propose une édition française de la correspondance de Heinrich Heine [Correspondance inédite. Paris : Michel Lévy Frères, 1866. Voir page 38/39 du livre ou 45/46 du document pdf], mais elle avait eu la délicatesse de ne révéler que le prénom de l’auteur ; Mathieu, de son côté, avait fait preuve d'une grande perspicacité en postulant que le rédacteur avait écrit en allemand, et de persévérance en proposant le peintre autrichien Koloman Moser (1868-1918), dit Kolo, comme destinataire possible.
Effectivement, Heine, qui maîtrisait parfaitement notre langue, avait écrit en allemand car il s'adressait à son ami Moses Moser (1796-1838) dont la Jewish Encyclopedia en ligne [qui pour l'occasion - voir ici - met à contribution G. Karpeles, Heinrich Heine, Aus Seinem Leben und Seiner Zeit, pp. 66 et seq. - merci à N.I. pour l'information] nous apprend qu'il fut un « German merchant (...), educated for a business career, and was for a time an assistant of the banker Moses Friedländer in Berlin. Afterward he became the confidential cashier of Moritz Robert there. Moser had considerable mathematical talent; and he also studied philology. With [Eduard] Gans [(1797 ou 1798-1839)] and [Leopold] Zunz [(1794-1886)] he helped to found the Verein für Kultur und Wissenschaft des Judenthums. He thus became friendly with Heine, who had a high opinion of his ability and character. (…) Many of Heine's most intimate letters were addressed to Moser, who was his closest friend up to the year 1830. »
Le texte original de la lettre se trouve sur Das Heinrich-Heine-Portal avec ses notes et ses gloses, voir ici. On y lit notamment la note suivante : « den beiden Cousinen – Heine las den Roman des französischen Sinologen Abel Rémusat, Fu-kiao-li, ou Les deux cousines, Paris 1826. Er war in Deutschland unter dem Titel »Ju-kin-li oder die beiden Basen« (Stuttgart 1827) erschienen. »
Voici pour conclure, voici la fin de la lettre de Heine de sa version allemande :
« Ich bitte Dich, laß das Sanskritt liegen u lerne chinesisch u überstze mir einen chinesischen Roman; das ist das beste was einer thun u lesen kann. Seit meiner Bekanntschaft mit den beiden Cousinen ist meine Seele in Peking, Nangink u To-tzong, ja in Orten die meine Zunge nicht einmahl aussprechen kann. Ich umarme Dich; leb wohl. Dein Freund. H. Heine. »
Et vous, pensez-vous que Heinrich Heine a raison lorsqu'il conseille à son ami d'apprendre le chinois et lui demande de traduire un roman chinois, car « c'est ce qu'il a de mieux à faire et à lire » ? (P.K.)
1 commentaire:
je découvre votre site et voudrais vous féliciter.
Je réagis sur les Deux Cousines, car j'ai fait récemment une communication dans le cadre du séminaire "retraduction" de l'équipe de littérature comparée de Nantes sur les traductions de ce roman par Abel-Rémusat puis par Julien quelque 30 ans après. L'article paraîtra l'an prochain. Mes recherches portent actuellement sur la naissance du roman de moeurs (et en particulier sentimental/caizijiarenxiaoshuo pour la tradition chinoise), selon une perspective de poétique comparée. A bientôt.
Ph. Postel (Université de Nantes)
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