lundi 17 septembre 2007

De la traduction

Plus que neuf jours à attendre pour aller se presser aux portes de
l'Amphi Guyon de l'Université de Provence (Aix-en-Provence)
pour assister au colloque international organisé par
l'Institut de la Francophonie et
le DELIC (Description Linguistique Informatisée sur Corpus),

« Le poids des langues.
Dynamiques, représentations, contacts, conflits
»,

les 27 et 28 septembre 2007.

Son programme, téléchargeable en format pdf à partir d'ici, est copieux : en tout pas moins de 19 communications, un débat et une table ronde (le 28/09, à 15 h). Parmi la vingtaine d'intervenants, on prendra, entre autres, plaisir à écouter Louis-Jean Calvet (U.P.) sur « Le poids des langues : vers un index comparatif des langues du monde », en compagnie d'Alain Calvet ( le 27/9, à 10 h) et Jean Véronis (U.P., directeur du DELIC et brillant blogmaster de Technologies du langage) sur « Poids des langues et technologies » (le 27/9 à 16 h, salle des Professeurs). Le 27/9, à 18 h, un débat intitulé « Poids des langues et traduction » réunira autour de Phillipe Blanchet (Université de Rennes II), Charles Zaremba (Professeur de linguistique slave, directeur du département d’études slaves de l’université de Provence, et traducteur de Kertész Imre, prix Nobel de littérature 2002, et de plusieurs auteurs hongrois), Richard Jacquemond (Maître de conférences à l'Université de Provence et chercheur à l'IREMAM, traducteur notamment de l'écrivain égyptien Sonallah Ibrahim (1937-) et Noël Dutrait. Souhaitons leur de bien accorder leur balance.



On retrouve également l'image du poids des langues et la métaphore de la pesée dans les bribes de l'introduction donnée par Myriem Bouzaher à sa traduction du dernier ouvrage d'Umberto Eco (1932-) sous le titre Dire presque la même chose. Expériences de traductions (Grasset, 464 pages) disponibles ici ou là (savoir sur les sites de vente en ligne) :
« Ce n'est pas un essai théorique sur la traduction, mais une illustration des problèmes que posent la traduction à travers des exemples qu'Umberto Eco a vécu : en tant qu'éditeur, en tant qu'auteur, en tant que traducteur lui-même. Ce sont ces trois éclairages-là que nous retrouvons sans cesse dans un texte qui fourmille d'exemples, en toutes les langues. Eco demande à ses lecteurs d'être plurilingues, et non polyglottes, nul besoin de maîtriser les langues citées pour comprendre, puisqu'on est toujours dans la comparaison. Lorsqu'on arrive à la notion capitale de la fidélité : s'il ne cite pas le fameux traduttore-traditore (que les Français ont inventé) il nous apprend que la fidélité n'est pas la reprise du mot à mot mais du monde à monde. Les mots ouvrent des mondes et le traducteur doit ouvrir le même monde que celui que l'auteur a ouvert, fut-ce avec des mots différents. Les traducteurs ne sont pas des peseurs de mots, mais des peseurs d'âme et dans cette histoire de passage d'un monde à l'autre tout est affaire de négociation... Tout bon traducteur est celui qui sait bien négocier avec les exigences du monde de départ pour déboucher sur un monde d'arrivée le plus fidèle possible, non pas à la lettre mais à l'esprit. Tout donc est dans le presque du titre. »
Sur le dernier opus de l'auteur d'Il Nome della rosa (1980) [Le Nom de la rose. Traduit par Jean-Noël Schifano, Grasset, 1982], il faut lire - rapidement car il va très rapidement quitter l'espace gratuit du Monde.fr - l'article en ligne de Lila Azam Zanganeh [initialement paru dans l'édition papier du 14/09/07 du quotidien Le Monde] :
Dire presque la même chose : traduire sans trahir.

Peut-on prétendre avoir lu Shakespeare, Dante, Cervantès ou Goethe quand on ne les a pas découverts dans leur langue d'origine ? La traduction, qui concerne près d'un tiers des romans publiés en France chaque année, permet de faire passer une oeuvre d'un idiome à l'autre, mais n'est jamais une reconstitution à l'identique. Elle opère, comme le souligne le titre du dernier recueil d'Umberto Eco, dans l'ordre du « presque » même, c'est-à-dire du proche, le plus proche possible, mais cependant différent. [Lire la suite]


Pour ne pas quitter la traduction et l'Italie, je voudrais signaler qu'un appel à contribution court jusqu'au 15 décembre 2007 pour participer aux premières Journées internationales d'études sur la traduction qui se tiendront à Cefalù, très accueillante ville de 13774 âmes dans la province de Palerme en Sicile, les 30-31 octobre et 1er novembre 2008. Le détail de l'appel figure sur Fabula.org (ici) ; en voici l'essentiel :

Sera au cœur de l'interrogation « le rôle joué par la traduction ou la terminologie dans l'évolution des langues, l'épanouissement intellectuel et le rapprochement des cultures », sous deux angles d'approche : l'angle littéraire, autour du sujet « Les problèmes linguistiques, culturels et interculturels de la traduction littéraire » ; et l'angle linguistique, autour du sujet « Les problèmes de la traduction sur objectifs spécifiques ». .../... « En dehors des présentations ayant trait au thème principal, le Comité accueillera favorablement les propositions traitant d'autres aspects pertinents de la théorie et de la pratique de la traduction et les métaphores traductionnelles. L'objectif global des Journées internationales d'études est de permettre aux participant-e-s de se pencher, à partir de divers angles, sur les acquis, les grandes questions et les perspectives de ces disciplines. Les réflexions porteront essentiellement sur la francophonie. »



Pour conclure, je vous rappelle que c'est le 26 octobre que se déroulera notre journée consacrée à la traduction : la prochaine réunion de notre équipe (le 25/9) permettra de peser toutes les propositions reçues et d'établir un programme qui sera communiquer sans délai. (P.K.)

Pour rester sous le signe de la pesée, j'ai retenu comme illustration à ce billet, ce document trouvé sur Canal Académie, la première radio académique sur internet. En vous rendant ici, vous pourrez lire ou écouter l'article de Bertrand Galimard Flavigny sur cet intéressant ouvrage publié vers 1763 : La balance chinoise ou lettres d’un Chinois lettré sur l’éducation.

dimanche 16 septembre 2007

Supplices chinois

« Ils torturent un Chinois : après lui avoir attaché les mains dans le dos, ils l'étendent face contre terre puis lui soulèvent la tête en direction des pieds aussi loin qu'ils peuvent et lui attachent alors les pieds avec ses cheveux et, s'il les a très courts, ils y ajoutent une petite corde ; ensuite ils lui font passer dans le dos, entre les jambes et les bras, un grand bâton avec lequel deux Chinois le compressent très fort et l'écrasent pour le faire avouer. »
J'ai choisi ce passage de la seconde partie du Voyage en Chine d'Adriano de las Cortes s. j. (1625) [réédité en 2001 chez Chandeigne (Collection « Magellane ») par Pascale Girard qui en signa la présentation les notes et la traduction de l'espagnol réalisée avec Juliette Monbeig (512 p. + 60 illustrations : texte cité, p. 454 ; illustration, p. 453] pour introduire « plaisamment » ce billet que m'a inspiré une annonce reçue ce jour :

La Librairie Le Phénix
nous invite dans ses murs à rencontrer
Jérome Bourgon

à l'occasion de la parution de
Supplice chinois
aux Editions La Maison d'à côté,
le vendredi 28 Septembre17 h)
au 72 boulevard de Sébastopol (Paris, 3e arr.)

Supplice chinois est, apprend-on, un coffret [15 x 15 cm] qui contient un livre de 236 pages et un DVD regroupant « les images des peines et supplices recueillis et analysés, ainsi que les photographies du démembrement de Foudjouri, le dernier supplicié. » Il retrace, documents à l'appui, « l’histoire d’un crime commis voici un peu plus d’un siècle dans un empire qui devait bientôt disparaître. » C'est « l’histoire d’un châtiment terrible, le lingchi 凌遲 ou supplice des «mille entailles», qui est devenu le « supplice chinois » par excellence. » C'est « l’histoire d’un regard, celui qu’une civilisation – la nôtre – porte sur une autre – celle de la Chine –, assez proche pour qu’elle s’y reconnaisse fugitivement, assez lointaine pour qu’elle repousse cet alter ego avec horreur. »

On peut, d'ores et déjà, se faire une idée de la riche documentation réunie en visitant le site consacré à cette recherche exemplaire. On peut aussi se rendre sur le site du Musée Niepce (Chalon sur Saône, 71) qui conserve les photographies que Jérome Bourgon analyse dans un documentaire de 18 minutes consultable à partir d'ici.

Nous avions déjà évoqué, rappelez-vous, ce travail à l'occasion de la publication du Supplice oriental dans la littérature et les arts édité par Antonio Dominguez Leiva et Muriel Détrie (Paris : Les éditions du Murmure, 2005, 352 p.) et tout récemment en annonçant la présence de son instigateur à la prochaine Fureur de lire de Genève. Vous ne pouvez donc plus échapper à ce supplice dont personne ne devrait trouver à se plaindre, bien au contraire. (P.K.)