Dramaturge et poète, Ma Zhiyuan (1226 ?-? 1285) occupe une fonction subalterne après la conquête du sud de la Chine par les Mongols et connaît une fin d'existence paisible loin de la ville. Un zaju composé avec trois autres dramaturges ou acteurs, Le Rêve du millet jaune (Huangliangmeng), et deux autres de ses pièces ont pour thème la conversion d'un être par un immortel taoïste qui lui fait prendre conscience de l'inutilité des passions, des plaisirs, des richesses et des honneurs du monde. Lettré confucéen, boucher qui voit ses clients convertis au végétarisme par un mystérieux adepte, esprit d'un saule transformé en marchand, tous finissent par accéder à l'immortalité. Le thème du renoncement apparaît dans la poésie (sanqu) de Ma et dans un autre zaju : un taoïste refuse tout ce que lui offre un empereur des Song à qui il avait prédit qu'il régnerait, préférant « dormir à son aise ». À la fin d'une autre pièce, un lettré, ami d'un réformateur des Song, obtient un poste, mais après avoir fait un portrait si sombre de sa condition, au prix de tant de difficultés que l'on a parlé du « fatalisme » de Ma. « Pessimiste », « nihiliste » sont des termes souvent accolés à son nom. Son théâtre n'en est pas pour autant triste ou vide de sens : l'humour n'en est pas absent et les scènes comiques, truculentes parfois, y abondent. Il touche à des problèmes réels à travers la légende ou l'histoire transformées pour les besoins du spectacle : les sectes taoïstes, les mœurs des courtisanes, des poètes-fonctionnaires, des marchands dans Les Larmes sur la tunique bleue (Qingshanlei). Fut-il un patriote ? On l'a dit à propos de son œuvre la plus célèbre pour le raffinement des images poétiques, la plus traduite, L'Automne au palais des Han (Hangongqiu). De toute manière, il reste un des plus célèbres dramaturges chinois.
L’auteur de ces lignes qu’on peut lire dans la partie en accès libre de l’Encyclopædia Universalis en ligne comme deux autres de ses articles sur les dramaturges chinois Gao Ming (XIVe s.) et Hong Sheng (XVIIe. s.) est François Veaux.
Ce sinologue discret et intègre nous a quitté le 18 septembre 2011 au terme d’une existence de soixante-dix années dont la plus longue partie fut consacrée à l’enseignement du chinois notamment à l’Université Bordeaux III. C’est là que je l’ai rencontré voici plus de trente ans et que j’ai suivi ses cours qui m'ont permis de découvrir les richesses de la poésie de la dynastie Tang et les subtilités du théâtre des Yuan dont il était un des rares spécialistes et un merveilleux traducteur --- j’espère qu’on pourra lire un jour ses traductions de Ma Zhiyuan qu’il appréciait tant. Les mots me manquent pour l’heure pour exprimer ma reconnaissance et la douleur que me cause sa disparition soudaine, aussi je me retire en vous invitant à écouter une prenante interprétation par Wu Zhaoji 吴兆基 (1908-1997) au guqin de « Yi guren »《憶故人》en cliquant >> ici<<.