mercredi 15 octobre 2008

Horizon BU

Vitrine d'un bouquiniste du quartier Kanda 神田, Tôkyô
(cliché PK, 24/08/07)


Bonne nouvelle pour les amateurs d'art, de lettres ou d'histoire de Chine : comme annoncé précédemment sur le blog, le fonds chinois qui dormait jusqu'à présent sur les étagères du sous-sol de la Bibliothèque Universitaire d'Aix-en-Provence sera bientôt mis à disposition des chercheurs et des étudiants.

Plusieurs centaines d'ouvrages en langue chinoise touchant à divers domaines sont en effet en cours de catalogage et seront consultables d'ici à quelques mois. Pour n'en citer que quelques-uns : pour les dictionnaires, le Dictionnaire des opéras et des spectacles populaires chinois (中国戏曲曲艺词典), le Kangxi zidian 康熙字典 ; pour la littérature ancienne, le Mencius 孟子, les Entretiens 论语, le Han Fei zi 韩非子, le Yijing 易经 ; pour les contes, le Vaste recueil de l'Ere de la Grande Paix 太平广记 (en intégralité), le Taiping Yulan 太平御览, les Chroniques de l'étrange 聊斋志异; pour les grands classiques de la littérature, les Trois Royaumes 三国演义, Au bord de l'eau 水浒传, le Rêve dans le pavillon rouge 红楼梦, la Pérégrination vers l'Ouest 西游记 ; pour l'Histoire, les Mémoires historiques 史记 et toutes les autres histoires dynastiques jusqu'aux Ming (en 24 volumes) ; pour l'archéologie et l'histoire ancienne, divers ouvrages sur les jiaguwen 甲骨文 ou sur les monnaies 古钱 ; pour la littérature chinoise du XXe siècle, des livres de Lao She 老舍, Ba Jin 巴金, Lu Xun 鲁迅, Guo Moruo 郭沫若 ; et dans les curiosités, des livres sur l'art du xiangsheng 相声, sur la peinture et la calligraphie, sur les techniques d'arts martiaux 武术, sur la médecine chinoise 中医, des collectors de revues chinoises (les Contemporains 现代), des traductions en chinois d'ouvrages occidentaux (Camus ou Saint-Exupéry notamment), et divers comptes-rendus de colloques ou résultats d'études sur la littérature, la sociologie, l'histoire, la démographie ou les publications chinoises. Nul doute que chacun pourra donc trouver son bonheur parmi ces ouvrages plus ou moins anciens, connus ou reconnus.

Une partie des livres sera librement consultable, mais la majorité restera en « magasin ». Il suffira alors pour se les procurer d'en faire la demande, et pour les découvrir de taper les mots-clés (titres, auteurs ou domaines) sur le portail Horizon de la B.U. : la recherche se fera alors en pinyin désagrégé, exception faite des noms propres (exemple : Shui hu zhuan – Zhongguo xi qu qu yi ci dian – Feng Menglong etc). A rappeler également que diverses revues en langue chinoise sont d'ores et déjà disponibles sur place dans la salle des périodiques (Yazhou zhou kan 亚洲周刊 notamment).

À noter enfin que le fonds de la jeune équipe LEO2T (« Littératures d'Extrême-Orient : textes et traduction ») précédemment catalogué sur un fichier électronique sera prochainement transféré à la B.U. Vous saurez donc où trouver les volumes qui vous intéressent. Bonne lecture et bonnes recherches à tous ! (S.C.)

mardi 14 octobre 2008

꼬끼오...꼬끼오!

(Photo extraite du site de Kyobo, la plus grande librairie de Séoul)

꼬끼오...꼬끼오!
(Cocorico ...cocorico !)

Jean-Marie Gustave Le Clezio (르클레지오), Prix Nobel de Littérature 2008 est sans doute l'écrivain français contemporain le plus prisé en Corée du Sud. Une vingtaine de ses livres a déjà été traduite et publiée, parmi lesquels Désert, Poisson d'or, Révolutions, L'africain... Son style d'écriture, au ton vif et énergique, est considéré à la fois comme classique et raffiné.

Le Clézio a fait plusieurs séjours en Corée du sud durant les 8 dernières années. Il est professeur invité à l'Université féminine d'Ewha, à Séoul, dans le quartier de Sinchon qui compte à lui seul 4 universités. Il est un professeur de littérature et de culture françaises apprécié des étudiantes pour sa gentillesse et sa disponibilité.

Comme d'autres, Le Clezio a été fasciné par le destin singulier et tragique de ce petit pays, coincé entre des grands, souvent envahi et spolié, habitué à se battre pour exister. Le Clézio écrit le coréen et connaît les rudiments de la langue. Dans le journal Le Monde du 10 octobre, Choi Mikyung, directrice du département de français de l'université d'Ewha et traductrice dit : « Le Clézio est apprécié des coréens car il parle de pays qui ne sont pas au centre du monde, qui ne prétendent pas à l'universalité. On sent qu'il comprend les souffrances des peuples qui ont été dominés au cours de leur histoire, comme la Corée ».

La nouvelle de l'attribution du Nobel de littérature a bien entendu été reprise par de nombreux médias et blogs, saluant parfois Le Clézio comme l'auteur français qui obtient la distinction « huit ans après Gao Xingjian, auteur d'origine chinoise, exilé en France ».

En décembre 2007, au cours d'une rencontre avec Hwang Sok-Yeong, autre espoir de Nobel de littérature pour la Corée, durant deux heures, les deux auteurs ont abordé leurs mondes littéraires et les questions de traduction. Ils se sont reconnus de nombreux points communs : nés approximativement à la même période, étrangers aux pays dans lesquels ils vivent (Le Clézio en Corée au moment de la conférence et Hwang Sok-Yong à Paris) ayant chacun vécus des guerres (Allemagne, Vietnam, Corée). Les deux écrivains ont insisté sur l'importance de la traduction pour l'internationalisation d'une oeuvre, Hwang Sok-Yong affirmant qu'un auteur mal traduit risquait de voir sa reconnaissance limitée.

JMG Le Clézio et Hwang Sok-Yong – décembre 2007

Le dernier roman de Le Clézio, Ritournelle de la faim (Gallimard), aurait été écrit en partie, dans une chambre de la résidence universitaire dans laquelle il résidait à Séoul et inspiré par une histoire vécue dans l'île (touristique) de Jeju, en 1948, lors d'une rébellion indépendantiste.

Au cours de sa conférence de presse improvisée dans les locaux de sa maison d'édition, à la question d'un journaliste sur le message qu'il avait à faire passer, Le Clézio répondit « Mon message, c'est qu'il faut continuer à lire des romans, en ces temps de crise mondiale ».

Kim Hye-Gyeong et Jean-Claude de Crescenzo