mardi 17 juin 2008

Bac philo pour Gao

Gri-gris au Collège impérial, Pékin (Cliché P.K., sept. 2006)

La saison des examens universitaires tire à sa fin, mais, qui s'en soucie, le bac est de retour. Avec, pour commencer et pour quelque 500 000 candidats !, son épreuve de philosophie toujours autant commentée par les médias : vous avez déjà dû trouver les listes de sujets - Peut-on désirer sans souffrir ? ; La perception peut-elle s'éduquer ? -, par ici, déjà des « corrigés en ligne », par là, et, toujours les mêmes questions « Doit-on en finir avec le bac ? », « A quoi bon la philosophie ? » matière « à part », etc !

Le Figaro n'est pas en reste avec cet article de Delphine Chayet et Aude Sérès avec Charlotte Gauthier, « Le bac philo vu par des personnalités étrangères » (17/06/2008) dont je reproduis ici le début, vous allez comprendre pourquoi :
Alors que les candidats au bac ont planché, hier, sur la philosophie, «Le Figaro» a demandé à des étrangers vivant en France de commenter les sujets. Du Prix Nobel de littérature Gao Xingjian au navigateur suisse Bernard Stamm, en passant par l'ambassadeur des États-Unis en France, ils ont joué le jeu alors même que l'étude de la philosophie au lycée est une spécificité bien française.
Gao Xingjian, écrivain chinois et Prix Nobel de littérature. Au sujet, « Est-il plus facile de connaître autrui que de se connaître soi-même ? », Gao Xingjian réplique que c'est précisément le thème de toute son œuvre, une longue quête, sans limite. Pour lui, c'est « Le » sujet par excellence. « Les jeunes qui passent le baccalauréat sont bien trop jeunes pour répondre à une telle question ! juge-t-il. C'est un vrai casse-tête et ils n'ont pas assez d'expérience dans la vie. » Pour lui, on n'a pas assez de toute une existence pour répondre à ce « problème philosophique fondamental ». La philo au lycée ? Selon lui, cela sert à la formation de l'intelligence, qui apporte des outils de raisonnement. C'est nécessaire, mais pour Gao Xingjian, la littérature est plus utile, plus liée à la vie, car « elle apporte de véritables témoignages sur la condition humaine ».
Alors quelle note mettriez-vous à l'élève Gao ?

Je me souviens avoir pour ma part plancher sur « Peut-on être sans avoir ? », mais pas des angoisses pré-bac. Par contre, je n'ai jamais pu oublier ce texte d'Henri Michaux (24 mai 1899 - 18 octobre 1984), « Examens en Chine » (Façons d'endormi, façons d'éveillé. Gallimard, 1969) :
Je suis en Chine ; arrivé d'un pays voisin, plutôt par erreur. On me donne d'entrée de quoi écrire pour suivre avec d'autres déjà bien avancés, une classe de chinois. Pas commode à tracer les caractères, ni à distinguer les uns des autres, ni à retenir. J'en trace un certain nombre, commettant beaucoup de fautes. Sans autrement broncher, de temps à autres les maîtres se penchent sur ma copie, la copie qui va décider de tout. L'épreuve continue et je confonds toujours certains caractères.
Or il y a 700 caractères qui signifient « mérite la mort » .
Saisissant, n'est-ce pas ? (P.K.)