Le Salon du livre de Paris ouvre ses portes au public demain 26 mars et ce jusqu'au 31 mars. Le trentième anniversaire d'une manifestation dont la tenue est source d'interrogations et de pesants sacrifices pour les petites maisons d'édition va permettre de rencontrer quelque 90 auteurs dont certains viennent de fort loin comme l'indien Tarun J Tejpal et le chinois Yan Lianke 阎连科. Ce dernier est, notez-le bien, attendu pour plusieurs rendez-vous les 26, 28 et 29 mars : vous aurez donc plusieurs fois la possibilité de lui demander ce qu'il pense du choix du titre retenu par son éditeur français pour sa dernière œuvre traduite chez nous.
Ce grand moment de la vie éditoriale française est l'occasion saisie par nombre d'éditeurs pour lancer sur le marché quelques appétissantes nouveautés. On ne s’étonnera donc pas particulièrement de l’apparition aux Editions Gallimard d’une nouvelle collection qui redonne vie, après un rachat salutaire, aux éditions Bleu de Chine dont la direction reste assurée par sa fondatrice Geneviève Imbot-Bichet. Trois titres font partie de cette fournée initiale qui marque tout à la fois une rupture (esthétique) et une continuité (éditoriale) ; il s'agit, respectivement, de :
- Un Vol, un long poème narratif « qui épouse le déroulement d’un vol, évoque un voyage à la fois réel et symbolique » de Yu Jian 于坚 (1954-) traduit par Li Jinjia et Sébastian Veg (72 pages) ;
- ce qui nous est présenté comme « une fable sur l'argent sale, la réussite et l'échec dans la Chine d'aujourd'hui [...] sous l'apparence d'un polar bon enfant », de la chinoise Bei Bei 北北, alias Lin Lan 林 岚 (1961-), traduit sous le titre Mon petit coin de monastère et prestement présenté (trois courtes pages) par Françoise Naour (104 p.) ;
- un titre dont la sortie avait été annoncée de longue date, Lèvres pêche de Cui Zi'en 崔子恩 (1958-) traduit par Sylvie Gentil ; je vous livre la totalité de l'appareil critique accompagnant les 304 pages de ce roman qui fit scandale au moment de sa parution en 1997 : « Pour avoir châtré au bistouri son fils, violoniste homosexuel, un médecin croupit dans un cachot. Jeu de monologues centré autour de cette figure paternelle, sombre et tourmenté, hanté par le vertige de la vacuité, Lèvres pêche révèle le mal de vivre des homosexuels en Chine. Premier roman sur le sujet jamais publié en Chine populaire, il y fut rapidement mis à l’index. » On peut regretter la brièveté de cette contextualisation et se désoler de la non moins brève présentation de l'auteur que voici : « Né en 1958, Cui Zi’en est cinéaste, féru des réalisateurs italiens (Visconti, Pasolini, Fellini…). Professeur à l’Institut du cinéma de Pékin, il a été démis de ses fonctions pour avoir publiquement admis son homosexualité. Il est aussi écrivain, critique et théoricien. » Elle mérite pour le moins une actualisation que nous vous proposerons un jour prochain. Il y a, en effet, beaucoup à dire sur ce personnage aussi controversé que médiatique lequel livrait avec Taose zuichun 桃色嘴唇 le premier jalon d'une œuvre, pas seulement littéraire, déjà abondante et qui a fini par se faire une place sur le continent. Pleine de surprises, elle offre même une intéressante étude sur l’œuvre romanesque de Li Yu 李渔 (1611-1680) (Li Yu xiaoshuo lungao 李渔小说论稿. Beijing : Zhongguo shehui kexue, 1987. 160 p.).
Bien d'autres titres font aussi l'actualité des littératures d'Extrême-Orient, mais retenu loin du centre des opérations, j'en suis réduit à ne vous livrer que de bien grossières approximations : il me faudra attendre l'arrivée de ces perles printanières dans les rayons de plus en plus fournis de notre bibliothèque universitaire pour être plus loquace ; ne perdez pas patience. (P.K.)
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