mardi 10 avril 2007

Trois revues et une exposition

Dans le numéro de janvier-février 2007 (n° 933-934) de la revue Europe, on trouve une très intéressante interview de Gao Xingjian, faite par Daniel Bergez, au sujet du thème de ce numéro : « Littérature et peinture ». Gao Xingjian y réaffirme les trois orientations de sa création : l’écriture narrative, la peinture et le théâtre. Il aurait pu aussi mentionner le cinéma puisque le public d’Aix-en-Provence a pu voir en juin 2006 son très étonnant film « La silhouette, sinon l’ombre », réalisé par Alain Melka et Jean-Louis Darmyn, sur lequel nous reviendrons prochainement.

Intitulée « Le troisième œil », cette interview permet à Gao Xingjian de définir sa démarche d’artiste polymorphe qui tente avant tout de « récupérer le temps perdu » après avoir « perdu sa jeunesse… pour rien ». C’est pour lui, « un défi, fragile et individuel, devant l’immense pouvoir du marché ».

Le même numéro de la revue Europe contient un dossier sur un autre prix Nobel, Elfriede Jelinek, avec des contributions de ses traducteurs, dont celle de Olivier Le Lay qui a reçu le prix André Gide 2006 pour sa traduction des Enfants de morts (Le seuil, 2007).

Le même Olivier Le Lay est interviewé dans la Revue des deux mondes de février 2007 qui comporte aussi un important dossier sur Elfriede Jelinek et la traduction de son œuvre. On méditera sur l’une des réponses de Olivier Le Lay :
« Une fois qu’on a isolé, élucidé puis traduit les problèmes de sens, il faut se lancer et commencer soi-même à créer. L’écriture de Jelinek est une formidable machine à assimiler les éléments étrangers, les apports, à rassembler les fragments. Elle les accueille, les transforme puis recrée un texte neuf à partir de ces mots en capilotade. (…) Là où de nouveaux mots naissaient, j’ai créé de nouveaux mots en français, c’était souvent la part la plus forte et la plus enthousiasmante de mon travail : valvuvle, testiculament, androgynécée, vélocipéder etc. »
Enfin, il faut lire le très copieux numéro XXV de la revue Etudes chinoises qui contient, outre un élogieux article sur les actes du colloque Gao Xingjian d’Aix-en-Provence de janvier 2005 sous la plume de Frédéric Wang, un compte rendu sur Les Œuvres de Maître Tchouang, traduit par Jean Lévi (Editions de l'Encyclopédie des Nuisances, 2006), sous la plume de Jean-François Billeter qui insiste sur les questions de la traduction de cet ouvrage. On y trouve par ailleurs un certain nombre de contributions qui concernent la polémique entre François Jullien et Jean-François Billeter… A suivre, sans doute…

Et pour revenir à Gao Xingjian, on peut se rendre jusqu’au 27 mai au Ludwigmuseum de Koblenz pour admirer la grande exposition de peintures intitulée « La Fin du monde » ! (N.D.)

Réponse à la devinette (001)

Personne n’a trouvé d’où était tirée la phrase sur la littérature chinoise et les sinologues français traducteurs. Il s’agit d’un livre intitulé Les Chinois, pendant une période de 4458 années, écrit par H. De Chavannes de la Giraudière, publié en 1845 à Tours, page 21 ! Agrémenté de très jolies gravures, ce livre décrit en presque 400 pages la Chine et son histoire, son gouvernement, ses arts, ses mœurs et usages… On peut y lire aussi :
« Le chinois, on le voit, n’a aucun rapport, ni avec l’hébreu, ni avec le grec. L’homme courageux qui veut l’étudier a tout à apprendre ; et, possédât-il la connaissance la plus approfondie des langues savantes et parlées de l’Europe, comme il n’existe aucune analogie entre elles et le chinois, il ne peut, en aucune façon, se guider par l’application des règles fondamentales qui forment la base du grec, du latin et de ses dérivés. »
On le voit, pour M. H. De Chavannes de la Giraudière, le chinois, ce n’est pas de l’hébreu ! (N.D.)

Outre Les Chinois pendant une période de 4458 années (Tours : Mame, 1845), Hippolyte de Chavannes De La Giraudière laisse une œuvre très variée dont les titres suivants donneront une petite idée :
La vapeur depuis sa découverte jusqu'à nos jours. Tours, Pornin, 1844.
Souvenirs d'un vieux pêcheur. Tours : Mamé et Cie, 1853
Récits et anecdotes de chasse. Tours, A. Mame, 1853.
Récréations technologiques : le coton, les peaux et les pelleteries, la chapellerie, la soie. Tours : A. Mame, 1856, 188 p. [Gallica]
L'Irlande, son origine, son histoire et sa situation présente. Tours, Alfred Mame, 1860
Les catastrophes célèbres. Tours : Alfred Mame, 1861. [Gallica]
Simon le Polletais, Esquisses de moeurs maritimes. Tours. Mame, 1876.
Les petits naturalistes. Tours : Alfred Mame et fils, 1889. [Gallica]
Trois de ces titres sont disponibles sur le site de la Bibliothèque Nationale de France. Bonne lecture, et à bientôt pour une nouvelle devinette. (P.K.)

dimanche 1 avril 2007

Retour du Japon

Je rentre d’un fort intéressant voyage à Tokyo où j’ai participé au Deuxième colloque international sur la France et l’Asie de l’Est, dont le titre était « Les intellectuels au XXIe siècle, la France, l’Asie de l’Est et le monde ». Un colloque organisé par la Maison franco-japonaise et la Société japonaise de didactique du français. Autant dire tout de suite que les organisateurs japonais, spécialistes de littérature française et traducteurs, parlaient dans un français parfait. Les langues officielles du colloque étaient le français et le japonais avec traduction simultanée effectuée par des interprètes remarquables. Certains intervenants se sont aussi exprimé en chinois ou en coréen.

Il est bien sûr impossible de parler ici du contenu de chaque communication (elles seront publiées dans un avenir proche), mais je rapporterai simplement ce qui m’a le plus marqué.

La plupart des intervenant, historiens, sociologues, politologues, ont montré comment la chute du Mur de Berlin et la disparition de l’URSS avaient marqué « la fin des idéologies » et comment les intellectuels de la fin du XXe siècle avaient pour beaucoup d’entre eux eu de la peine à se situer dans le nouveau débat politique.

L’une des communications les plus originales fut celle de l’écrivain marocain Abdelkébir Khatibi qui a parlé de l’intellectuel face au mondialisme en prenant son cas comme exemple. Il a déclaré : « Altermondialiser sa pensée, c’est aller vers la construction de cette œuvre collective avec d’autres penseurs et artistes, à travers la diversité des sociétés et des cultures. L’intellectuel d’aujourd’hui est appelé à être le traducteur actif et tolérant de nos différences, quels que nous soyons. »

Dong Qiang, professeur à l’université de Pékin, écrivain et traducteur, s’est posé la question : « La Chine aura-t-elle un miracle intellectuel au XXIe ? » Et il a conclu : « Ce dont la Chine a besoin aujourd’hui, est un mouvement non pas intellectuel, mais un mouvement de nouvelle culture, seul capable de remédier aux dégâts de la révolution culturelle, et fournir un terrain aux intellectuels. »

Gu Zheng, photographe de Shanghai, a présenté la nouvelle photographie chinoise, telle qu’on a eu l’occasion de la voir à Arles il y a peu de temps.

Chen Danqing, peintre chinois résident aux USA, a parlé des relations difficiles entre les intellectuels chinois et le pouvoir communiste.

De célèbres artistes japonais, Minato Chihiro et Kolin Kobayashi, ont présenté leurs œuvres en phase avec les attentes du XXIe siècle. La matinée consacrée aux intellectuels « précaires » fut particulièrement instructive puisqu’elle nous a permis de découvrir que les jeunes intellectuels japonais avaient les mêmes difficultés que leurs homologues occidentaux pour trouver des espaces pour s’exprimer et des moyens de gagner leur vie.

Enfin, le public japonais sembla particulièrement apprécier la polémique franco-française qui a éclaté le deuxième jour avec l’exposé à la tonalité très radicale de Serge Halimi, journaliste au Monde Diplomatique, dénonçant la main-mise du grand capital sur les média et les intellectuels, tandis que l’historien Christophe Prochasson, de l’Ecole des hautes études en sciences sociales, s’efforçait de nuancer cette analyse.

Le célèbre poète Ko Un et le critique littéraire Choi Won-shik ont tous deux rappelé la tragédie que vit la Corée depuis de longues années, toujours coupée en deux, malgré des efforts de rapprochement souvent demandés et soutenus par les intellectuels.

Enfin, j’ai voulu, dans ma communication, « Gao Xingjian, un intellectuel à la marge », montrer comment cet intellectuel chinois du XXe siècle, prix Nobel de littérature, préférait rester en dehors des grands débats politiques pour se consacrer à son œuvre dans laquelle il exprime sa pensée en profondeur. J’ai bien entendu
mentionné le dialogue exceptionnel qui avait eu lieu à Aix-en-Provence, en octobre dernier, entre l’écrivain et intellectuel engagé japonais Oe Kenzaburo et Gao Xingjian.

On se souvient peut-être que Gao Xingjian avait dit à Oe Kenzaburo :
« Je vous admire beaucoup, parce que vous êtes comme dans Le Mythe de Sisyphe de Camus, vous êtes un Sisyphe moderne, c’est tragique. Mais vous, vous en êtes tout à fait conscient et vous continuez à vous lancer dans le débat politique, vous vous battez sans fin pour la justice alors qu’elle ne peut exister, ce sera toujours tragique, mais vous restez toujours aussi héroïque, je vous admire vraiment. »
Tout au long de ce colloque, j’ai eu la chance de faire la connaissance d’éminents professeurs japonais tels que MM. Ishizaki Harumi, Tachibana Hidehiro, mais aussi de la sociologue Gisèle Sapiro, dont l’un des thèmes de recherche est la sociologie de la traduction des littératures étrangères, de l’historien Christophe Prochasson et de Jacques Julliard, éditorialiste au Nouvel Observateur. Rien de plus stimulant que d’échanger, discuter, manger, boire un verre (de thé, de bière, de saké ou de vin rouge) avec tous. Et aussi de revoir Françoise Sabban, directrice de la Maison Franco-japonaise, spécialiste de l’alimentation en Chine. Souvenez-vous de son excellente préface à l’excellent livre de Lu Wenfu traduit par Annie Curien, Vie et passion d’un gastronome chinois, Picquier 1988.

Enfin, une découverte grâce à Pierre Lévy de l’université d’Ottawa : l’existence d’une recherche pour mettre au point un « système d’adressage sémantique universel » qui facilitera la communication entre les intellectuels du monde entier. Voir à ce sujet le site www.ieml.org.

Décidément, je n’ai pas perdu mon temps. Et, pendant que nous restions enfermés dans une salle de réunion sans fenêtres, les cerisiers japonais se préparaient à ouvrir leurs fleurs, à une date que la météorologie nationale du Japon avait mal déterminée, en raison d’une erreur d’informatique… Noël Dutrait

La joie des poissons

Lors d'une excursion, Houei Cheu [Huizi 惠子] et son ami Tchouang Tcheou [Zhuang Zhou 莊周] s'étaient retrouvés sur la jetée qui surplombait la rivière Hao. Tchouang s'était exclamé :
- Les poissons ! Vois comme ils s'ébattent librement, comme ils doivent être heureux !

- Comment sais-tu qu'ils sont heureux ? Tu n'es pas un poisson ! avait ergoté le rhéteur.
- Tu n'es pas moi, comment sais-tu que je ne puis savoir si les poissons sont heureux ?
Houei avait cru avoir le dessus par cette réponse :

- Si n'étant pas toi, je ne puis savoir ce que tu sais, n'étant pas un poisson tu ne peux savoir si les poissons connaissent la joie.

- Il a bien fallu que tu saches que je sais pour me poser la question, avait répondu Tchouang.
Et avec un geste ample de la main, il avait conclu :
- Je le sais parce que je me trouve là, sur la jetée de la Hao ...
Cet extrait du chapitre 17 du Zhuangzi 莊子 (ici traduit par Jean Lévi, Les Œuvres de Maître Tchouang. Paris : Editions de l'Encyclopédie des Nuisances, 2006, p. 142-143) pour saluer dignement ce 1er avril, qu'on appelle ailleurs April Fools' Day ou All Fools' Day, Aprilscherz ... ou encoreエイプリルフール au Japon, 만우절 en Corée et 愚人节 en Chine. (PK)

samedi 31 mars 2007

Web littéraire (001)

Ceux qui prédisaient que l'internet allait tuer le livre et la littérature devraient revoir leurs prévisions alarmistes à la baisse car l'édition traditionnelle n'est pas encore morte avec pas moins de 57 728 titres parus en France en 2006 !, et la littérature occupe de plus en plus d'espace sur la toile : le nombre d'ouvrages accessibles depuis n'importe où et n'importe quand est impressionnant et ceci quelle que soit la langue. C'est notamment le cas pour le web chinois, nous y reviendrons un jour prochain.

Mais restons-en, pour l'heure, à un espace, certes plus réduit, mais qui échappe déjà à toutes les tentatives d'approche exhaustive.

Si l'on veut mener "une réflexion approfondie sur la pérennité du livre et de la lecture dans notre société", on peut justement profiter des avantages de l'internet pour visionner les six heures de vidéo que représente l'ensemble des interventions du colloque intitulé « L’avenir du livre » qui s'est tenu à Paris le 22 février 2007, sur le site du Centre National du Livre. Ne manquez pas les interventions de Marc Fumaroli, de l’Académie française, historien, essayiste et surtout d'Alain Mabanckou, écrivain, essayiste autour du thème "Pourquoi développer le goût de la lecture ?"

le premier contact entre la littérature et l'internet date de 1971, année de la création du Projet Gutenberg par Michael Hart. Il est assez réconfortant de constater que le premier site proposant du "contenu" sur le réseau est un site de littérature, et que l'objectif de ce site est de mettre à la disposition de tous le plus grand nombre possible d'œuvres littéraires du domaine public. Un objectif poursuivi par des générations de bibliothécaires, et qui devient enfin possible, grâce à la numérisation des livres en mode texte dans un format simple qui puisse être lu par tous les systèmes et sur toutes les machines. Au milieu des années 1990, lorsque l'utilisation du web se généralise, le projet trouve un second souffle et un rayonnement international. [Lire la suite ici, voir aussi ici].
Notons que sur les 20 000 titres dorénavant disponibles qui se répartissent en quelque 50 langues différentes, on ne trouve qu'une cinquantaine de titres chinois, tous classiques. Beaucoup reste donc à faire. Au Top 100 des 2 millions de téléchargements mensuels, c'est le Sunzi 孫子 qui l'emporte grâce à la version anglaise qu'en donna le fils d'Herbert Giles (1845-1935), Lionel Giles (1875-1958) en 1910 (The Art of War).

Une fois signalé le Project Gutenberg, il subsiste un immense territoire à baliser afin d'en faire émerger le meilleur - ce sera une des missions que tentera de remplir ce blog au fil des semaines à venir. En guise de mise en bouche, je ne pouvait manquer de relever que dans ses derniers "Rebuts de presse" (22 mars 2007), Didier Jacob (Le Nouvel Observateur en ligne) a livré un relevé utile qu'il présente ainsi :
Nous publions cette semaine dans l'Obs un dossier spécial consacré aux 50 meilleurs sites littéraires. En voici la liste augmentée, que nous vous engageons à compléter et à enrichir, en laissant en commentaires les adresses de vos sites préférés. Nous ajouterons les meilleurs, au fur et à mesure, à la liste qui suit.
Passée la déception de constater que prudemment il ne vise pas à l'exhaustivité, et donc de n'y pas trouver votre blog préféré - celui de notre équipe s'entend -, on peut, surtout s'y l'on est néophyte en la matière, se livrer avec enthousiasme à son auscultation systématique. On peut aussi picorer en testant les adresses inconnues, ou pas visitées depuis longtemps. C'est simple, il n'y a plus qu'à jouer de la souris.

Certes, il est, au bout du compte, rarement question dans ces sites des littératures du bout du monde qui nous passionnent, mais ce parcours mérite d'être entrepris. A chacun d'établir son palmarès et d'accrocher selon ses goûts des adresses dans la liste de ses signets. Outre quelques magazines littéraires déjà évoqués dans ce blog comme celui du Magazine de la littérature étrangère Transfuge, le Magazine littéraire, Lire, il renvoie aux revues américaines littéraires qui traitent à l'occasion des littératures asiatiques et indiennes.

Voici à titre d'exemple mes sites préférés : l'incontournable site de la BNF, Gallica, bien sûr, mais aussi Littératures et compagnies - annuaire des sites consacrés aux auteurs classiques et contemporains -, Fabula (déjà évoqué ici), Athena, La République des livres - le blog de Pierre Assouline -, et aussi le Zazieweb - capharnaüm communautaire des adeptes de l'e-lecture.

Last but not least, le surprenant site de l'éditeur Zulma dont on peut consulter les catalogues chinois, et surtout coréen ... N'est-ce pas déjà suffisant pour illuminer un week-end pluvieux. (PK)

vendredi 30 mars 2007

Bye-bye India

Comme le signale Alain Beuve-Méry [dans Le Monde en ligne du 28/03/07], le Salon du Livre 2007 a fermé ses portes mardi 27 mars à 22 heures, après avoir accueilli 186 000 personnes, soit 6 % de plus par rapport à 2006, alors que le Salon "ne compte plus que cinq jours (contre six les autres années)". "Les éditeurs, ajoute-t-il, ont réalisé, dans l'ensemble, un bon chiffre de ventes", avant de conclure par ce paragraphe :
Autre phénomène : l'Inde. Près de 15 000 exemplaires ont été vendus par la "Librairie indienne" du Salon (...), notamment Baby Ji, d'Abha Dawesar (éd. Héloïse d'Ormesson) et Loin de Chandigarh, de Tarun Tejpal (Buchet-Chastel), les deux livres les plus demandés en grand format ; mais on note aussi une grande vogue pour les livres en format de poche (dont deux à 2 €) et pour les essais. Seules la Russie et l'Italie ont enregistré un plus grand succès en termes de ventes. En 2008, la littérature israélienne succédera à celle de l'Inde."
En guise d'ultime écho à cette édition du Salon, j'ai retenu ce billet daté du 28/03, qu'Abha Dawesar a posté sur son blog français, billet intitulé "Par delà le péché et le plaisir" dont je ne cite ici que les dernières lignes :
Il fait beau et il n’y a pas de vent. Je transpire. La sensation du soleil sur la peau reste un plaisir aussi grand que le goût d’eau fraîche bu quand on a soif. Le matin j’avais noté les péchés capitaux sur une feuille parce que je ne viens pas d’une culture judéo-chrétienne. J’ai du mal à se souvenir de tous les péchés en cherchant le péché qui correspond avec le plaisir du soleil. Cet instant je suis tout près de peuples anciens qui ont cru que le soleil est un dieu. (Lire le texte entier, ici )
En illustration, j'ai choisi un fragment de la page web de l'espace de cette artiste touche-à-tout [voir son site], sur MySpaceVideo, où l'on peut voir 1 mn 19 s d'un film qu'elle a réalisé. (PK)

samedi 24 mars 2007

Miscellanées (002)

Le Monde - comme l'ensemble de la presse - saluait hier l'ouverture du Salon du Livre, et, qu'il en soit remercié, pense à ceux qui - comme moi - ne peuvent s'y rendre en leur offrant la "Littérature indienne sur la Toile" et (entre autres) un article salutaire de Christophe Jaffrelot intitulé "Diversité linguistique et vitalités littéraires". La version en ligne du Monde des Livres est à l'unisson et sous la plume de Raphaëlle Rérolle chante l'audace et la liberté d'Abha Dawesar :
Abha Dawesar porte sur le corps des femmes un regard extraordinairement libre, sans être impudique. Dans un pays où l'évocation du sexe en littérature n'est pas monnaie courante et où, affirme l'auteur, "l'amour entre les femmes est tabou", Babyji jette gaiement un pavé dans la mare. (Lire l'article ici).
En plus d'un papier de circonstance titrant "Les indiens à Paris" , le Figaro Littéraire (en ligne) dresse une liste de "Douze éditeurs aux quatre coins de France" parmi lesquels figurent les Editions Tristram (Auch), à qui l'on doit la si belle traduction de Guy Jouvet du Tristram Shandy de Laurence Sterne (La vie et les opinions de TS, gentilhomme, 2004, 937 p.), mais aussi les Editions de L'Aube avec ce commentaire dont on goûtera diversement la forme, et peut-être le fond :
"Il était une fois, un auteur chinois... qui connaissait l'écrivain Gao Xingjian, Prix Nobel de littérature et traduit en français aux éditions de l'Aube, dans le Lubéron (Une canne à pêche pour mon grand-père ; La Montagne de l'âme...) Il envoya son manuscrit. L'écrivain chinois était content. Désormais, il savait deux noms de villes françaises : Paris et La Tour-d'Aigues. Aussi fut-il fort surpris quand Marion Hennebert, l'éditeur, lui appris que La Tour-d'Aigues n'était pas, loin s'en faut, la deuxième ville du pays... "
Pour finir ce billet décousu, voici le moyen de vivre le Salon du Livre par procuration. Il suffit d'aller visiter sa WebTv. (PK)

Nouveauté éditoriale (03/07)

L'événement est suffisamment rare, et réjouissant, pour être noté dès qu'il intervient sans même avoir pris le temps d'en évaluer l'impact réel. Cet événement est la publication, le 22 mars 2007, d'un nouveau volume de la 'Série chinoise' de la collection « Connaissance de l'Orient » aux Editions Gallimard, prestigieuse collection créée par Etiemble (1909-2002) et dirigée par Jacques Dars. [Je reviendrai prochainement (?) sur cette collection et sur ses autres séries qu'on peut, en attendant, découvrir sur le site de l'éditeur.]

Le précédent numéro de la série est le très remarquable volume consacré aux Elégies de Chu [Chu ci 楚辭], attribuées à Qu Yuan 屈原, Song Yu 宋玉 et autres poètes chinois de l'Antiquité, IVe siècle av. J.-C. - IIe siècle apr. J.-C., traduites, présentées et annotées par Rémi Mathieu (vol. 111, 2004, 306 pages).

Ce dernier numéro en date donne la vedette au poète des Tang, "poète maudit" ou "poète fantôme" comme on voudra, Li He 李賀 (791-817) :

Li He, Poèmes. Traduit du chinois par Marie-Thérèse Lambert. Préface et notes de Guy Degen. Paris : Gallimard, « Connaissance de l'Orient », n° 115, 'Série chinoise', 206 p. :
Qu'un poète au destin aussi tragique que celui de Li He (791-817) ait eu pour troisième nom Li Changji (« Infaillible Bon Augure »), voilà qui tient de la gageure. Pourtant les meilleurs auspices semblaient réunis : une bonne famille – le poète descend du clan impérial – et un vrai talent – le célèbre lettré Han Yu, qui deviendra ministre, lui accorde son appui après avoir admiré ses poèmes. Son destin s'éclaire-t-il alors ? Non, puisqu'on lui refuse jusqu'au droit de se présenter au concours de « lettré avancé » pour des raisons onomastiques. Il obtient à grand-peine un poste subalterne au Bureau des Rites, insuffisant pour les nourrir, lui, sa mère et son jeune frère. De Changgu, sa ville natale au Henan, à Chang'an, la capitale, il promène son tragique destin.
L'homme inquiète par sa silhouette squelettique, ses cheveux blancs, ses sourcils d'un seul tenant et ses ongles démesurés. Cultive-t-il son air de fantôme (les Chinois le nomment « poète fantôme » ou « fantôme parmi les poètes »), on ne sait, mais ce n'est pas étonnant que les anthologies l'aient boudé et que les lecteurs l'aient fui. Trop de malheur ! Il ne se nomme guère dans ses vers, mais tout parle de lui, tout est lui : ministre évincé, favorite oubliée, palais déserté... jusqu'à l'armoise qui l'envahit.
Peut-on encore ignorer quel génie fut Li He ? Donnons-lui auprès des Li Bo et Du Fu la place qu'il mérite.
[Présentation de l'éditeur]
L'ouvrage propose, me semble-t-il, l'œuvre complète, soit quelque 243 poèmes. C'est beaucoup plus - et sans doute encore mieux -, que les 58 déjà disponibles dans Li He, Les Visions et les jours. Choix de poèmes traduits du chinois et présentés par Marie-Thérèse Lambert et Guy Degen. Paris : Editions de la différence, coll. « Orphée », n° 191. 1994, 123 p. Certes, ce petit volume était une édition bilingue très utile, mais, il n'est plus guère trouvable en librairie. Sa confrontation avec ce jeune frère de 13 ans son cadet sera très instructive pour suivre l'évolution de la traduction par M.-T. Lambert et Guy Degen de ce poète aussi fascinant qu'attachant. On en reparlera donc ici, ou ailleurs, mais si vous avez un avis, n'hésitez pas à laisser un commentaire. (PK)

lundi 19 mars 2007

Devinette (001)


Qui peut dater le texte ci-dessous et en identifier l'auteur ?
Outre l'histoire et la poésie, les Chinois ont une multitude innombrable d'ouvrages d'éducation, de contes, de fables, de romans, de pièces de théâtre. Depuis une vingtaine d'années, les sinologues français ont traduit des comédies et des romans qui, mieux que tous autres documents, nous ont initié à la vie intime des Chinois, à leurs moeurs, à leurs usages, à leurs croyances. Ce qu'il y a de remarquable, c'est que toutes ces oeuvres d'une apparence futile, ont un but moral et instructif. Elles sont remplies de maximes de sagesse et de conseils excellents. Nulle part les livres ne sont aussi nombreux qu'en Chine. Deux circonstances y contribuent puissamment : c'est d'un côté leur bas prix, et de l'autre l'énorme quantité de gens qui lisent. On peut dire, sans hyperbole, que tous les Chinois, même des dernières classes, sont en état de s'exprimer au besoin par écrit, et que le goût de l'instruction y est universel. En considérant la vaste étendue de l'empire et son innombrable population, les exceptions à la règle générale que nous venons de poser sont tellement rares, qu'elles confirment notre proposition, tout étrange qu'elle puisse paraître.
Merci de tenter votre chance avec la première de nos devinettes en glissant vos réponses dans un commentaire. Les solutions seront fournies dans les semaines qui viennent.

Difficulté 3/5 pour la datation, 5/5 pour l'attribution. (ND/PK)

dimanche 18 mars 2007

Sur la traduction

Les Éditions du Cercle de la Librairie publient "tout ce qui intéresse les professionnels et les passionnés du livre : ouvrages de référence et de réflexion, manuels pratiques sur les techniques et les métiers du livre, beaux livres sur l'histoire de l'édition..." Parmi ces "livres qui parlent du livre", on trouve celui, tout récent, de Marie-Françoise Cachin.

Intitulé simplement La traduction (Electre - Ed. du Cercle de la Librairie, 2007, 144 p.), et publié en février dernier, il propose un "examen de la situation de la traduction littéraire dans les pratiques éditoriales aujourd’hui en France, un portrait du métier de traducteur, précise son statut et son environnement professionnel et aborde la place de la traduction chez les éditeurs, les relations traducteurs-éditeurs et la publication des traductions. Avec des adresses d’associations et d’organismes de formation."

Notre équipe ne manquera pas de s'en doter prochainement et d'en rendre compte dans ce blog. (PK)

samedi 17 mars 2007

Le roman chinois en hausse

Lu dans le blog de Pierre Assouline (La République des Livres), dans un billet intitulé "L’anglais règne en librairie", ce relevé de chiffres publiés par la revue Livres Hebdo (n° 681, vendredi 16 mars 2007) :
En 2006, 41,4 % des romans publiés en France ont été traduit d’une langue étrangère .../... L’anglais arrive naturellement premier avec 2503 titres [soit] 75,5 % des titres ! Juste après, on trouve l’allemand et l’espagnol avec 134 titres (soit 4 %) suivis par l’italien (108 titres soit 3,3 %). Morne plaine… Le russe (qui recule) et les langues de l’est se tiennent au coude à coude (44 titres traduits dans l’année), puis les langues scandinaves, le japonais… Seule percée notable : le roman chinois avec 37 titres traduits.
Je ne peux malheureusement pas compléter cette présentation rapide de l'analyse intitulée "Les traductions 2006 : My translator is rich" (p. 70 à 72), car je ne suis pas abonné à cette revue qui s'adresse avant tout aux professionnels de l'édition, mais le site de l'hebdo propose la consultation de sa une qui titre sur la "Légère baisse des traductions en 2006" et de son édito/sommaire qui ne fait qu'effleurer le sujet qui nous intéresse :
Le seul secteur où le nombre de traductions augmente est le roman. En 2006, plus de quatre romans sur dix provenaient de l’étranger, soit 5 % de plus qu’en 2005. Les romans de langue anglaise, déjà largement dominants (trois traductions sur quatre) progressent encore un peu. Mais d’autres littératures et d’autres langues, et c’est là une bonne nouvelle, gagnent aussi des points. C’est le cas de l’allemand, de l’italien, de l’espagnol, des langues d’Europe de l’Est et… du chinois, parti de bien bas, il est vrai.
Il est à parier que l'Inde va rattraper son retard en cette année 2007, si ce n'est déjà fait à l'occasion du Salon du Livre. (PK)

vendredi 16 mars 2007

Abha Dawesar

Le Centre National du Livre (CNL) se met aussi à l'heure indienne. Outre le détail des manifestations du Salon du livre, il fournit une utile et brève présentation des littératures indiennes, ainsi que des "Biobibliographies" des 31 auteurs indiens présents à Paris pour cette manifestation.

Parmi eux, Abha Dawesar. "Née en 1974 à Delhi, [elle] est partie étudier à New York à dix-sept ans et s’y est établie. Diplômée de Harvard en philosophie politique, elle a d’abord travaillé dans le secteur bancaire, abandonné il y a quelques années pour mieux voir la vie et le monde à travers l’écriture (en anglais)." En plus de Babyji (Anchor Books, 2005) qui a reçu l'American Library Association’s Stonewall Award, elle a déjà publié Miniplanner (Cleis Press, 2000) et That summer in Paris (Doubleday Publishing, 2006)

Son Babyji, traduit par Isabelle Reinharez, sort cette semaine chez Héloïse d’Ormesson (collection "De l'attraction des corps") qui en assure la promotion sur son blog :
"À 33 ans, elle est l'auteur indien qui dérange. Avec Babyji, [son] premier roman traduit en français, Abha Dawesar met en scène l'homosexualité féminine et la frénésie de séduction." [A la question :] "Votre héroïne est une lycéenne qui séduit une femme divorcée, puis la servante de sa maison, et initie enfin à ses jeux la plus jolie fille de sa classe. Comment ce roman a-t-il été accueilli en inde, que l'Occident imagine très puritaine?"[, Abha Dawesar répond :] "L'Occident n'a pas forcément une vision très perspicace de l'Inde. Qui d'ailleurs, peut sérieusement prétendre saisir ce pays dans la totalité de ses cultures, de ses langues, de ses populations? L'Inde est traversée d'une quantité de contrastes, à mon avis sans équivalents dans le monde. C'est un pays jeune où plus des deux tiers des habitants ont moins de vingt-cinq ans : cela se répercute évidemment sur les mentalités. La croissance économique, le développement de technologies, l'arrivée des chaînes satellitaires, ont été facteurs de bouleversements importants. Mes personnages et le milieu dans lequel ils évoluent - la moyenne de Delhi - expriment ces changements. L'accueil réservé à Babyji a été triomphal." (Lire la suite ici)
Abha Dawesar est très présente sur l'internet à travers un site personnel et deux blogs : l'un en anglais, et l'autre plus récent en français, mais aussi sur MySpace : et dans le Fig Tree (blog de Tatania de Rosnay) qui en donne un "Portrait".

Elle et son ouvrage le seront aussi au Salon du livre, mais déjà sur France 5. Elle a, en effet, participé au Bateau livre du jeudi 15 mars, 21:35 [rediffusion le dimanche 18 mars, 10:00], et répond pendant 10 minutes aux questions de Frédéric Ferney (à partir de la 30ème minute) : l'émission devrait être disponible pendant une semaine (voir ici).

Pour l'heure, on peut continuer à saliver en lisant la présentation de Babyji que donnait en 2005 son éditeur, Anchor Books :
Anamika's the kind of girl her traditional peers aren't quite sure about: is the sexually precocious heroine of Dawesar's second novel (after Miniplanner) a feminine Didi or a masculine Bhaiyya, a cerebral schoolgirl or a predatory lecher? After studying chaos theory in her high school physics textbook, Anamika feels justified in pursuing three simultaneous same-sex affairs, with her doting servant, her impressionable schoolmate and a beautiful older woman who inspires such complicated feelings that Anamika nicknames her India, after their vast and varied homeland. Anamika uses sex as a means to investigate life's chemistry and her autonomy outside of rigid Brahmin mores. Despite the intensity of her passion, particularly for India, Anamika's comic stiffness is evident in such amorous declarations as "I want to collapse my wave function into you." As issues of caste, meritocracy and self-sacrifice arise, Anamika purifies her intentions by channeling them into helping a troubled male student, Chakra Dev, who's almost as oversexed as she is. If the unusual secondary characters occasionally seem as gratuitous as pornographic movie extras, Anamika's ponderings and emotional reversals are lavished with as much attention as a 16-year-old girl would demand. Despite its meandering path, the novel achieves an impressive balance between moral inquiry and decadent pleasure, pleasing the intellect and the senses - if not necessarily the heart - of the open-minded reader.
Vos réactions à la lecture de ce roman seront les bienvenues. Je vous communiquerai les miennes, si, finalement, je succombe aux charmes de ce sujet et de son auteur. (PK)

lundi 12 mars 2007

Printemps indien



Salon du livre 2007 oblige, l'Inde et sa littérature sont les vedettes du Magazine littéraire qui leur consacre un copieux dossier pour son n° 462, dossier présenté en ces termes :
Ce dossier constituait un défi : comment rendre compte de l’Inde, son immensité, sa complexité, sa richesse, depuis ses fondamentaux (les textes sacrés) jusqu’à sa littérature vivante ? Cinq mille ans d’histoire et de culture, et une évidence qui s’impose : l’Inde sera l’un des géants du millénaire. Le Magazine littéraire a choisi de donner la parole à des spécialistes – linguiste, historien, philosophe – qui éclairent tel ou tel aspect de la civilisation indienne, et son rapport à l’Occident. Et surtout de privilégier ses écrivains : Vikram Seth (avec un extrait inédit de son grand roman en vers), les témoignages et réflexions de Salman Rushdie, Shashi Tharoor, Amit Chaudhuri, Indrajit Hazra, Kiran Desai et bien d’autres. S’en dégage une vision nouvelle de l’Inde, un état des lieux à la fois panoramique et atomisé. Une initiation et une invitation, par le texte et l’image, à la découverte et à la lecture.
En complément à ce dossier, le magazine propose "en exclusivité sur [son] site web : une petite bibliothèque indienne portative" élaborée par Jean-Claude Perrier. On y croise entre autres les noms de Paul Morand, Pierre Loti, Henri Michaux, Alberto Moravia et bien sûr Nicolas Bouvier. Ajoutons à cette liste celui du moine Faxian 法顯 pour son Foguoji 佛國記 (Mémoires sur les royaumes bouddhiques), premier récit de voyage Chine/Inde (337-vers 422) à avoir été conservé dans son entier et dont on attend une nouvelle traduction française avec impatience car celle qu'Abel Rémusat (1788-1832) ne put achever de son vivant, n'est accessible que par bribes dans Les pèlerins bouddhistes de la Chine aux Indes présentés par André Lévy chez J.-C. Lattès en 1995 (pp. 83-119).

De son côté, Transfuge, la revue bimestrielle de littérature étrangère qui avait établi un "Etat des lieux de la littérature chinoise contemporaine" dans son premier numéro paru en janvier 2004, consacre également un dossier à la littérature indienne contemporaine. On peut en consulter le sommaire ici.

Quant au BIEF (Bureau international de l'édition française), il publie sur son site le programme des Rencontres professionnelles entre éditeurs indiens et français en avant-première du Salon du Livre de Paris :
Le séminaire portera principalement sur le droit d’auteur et les échanges de droits et offrira également une présentation des secteurs éditoriaux porteurs en Inde. Une occasion pour les éditeurs français d’approfondir un échange avec leurs homologues indiens, à deux jours du Salon du livre.
En complément de cette opération, Le BIEF publiera un dossier spécial de La Lettre consacré à l’édition indienne, aux principales problématiques qui se présentent à elle, aux perspectives d’échanges de droits et de coopération entre les professionnels du subcontinent et de la France. Il comprendra un encart réunissant les portraits des éditeurs indiens présents et la description de leurs maisons.
Affaire à suivre donc. (PK)

Yan Lianke

A lire le portrait de l'écrivain Yan Lianke 閻連科, l'auteur du Rêve du village des Ding (Picquier), paru dans le quotidien Libération du jeudi 8 mars 2007 : "Encré dans le Parti".

L'auteur, Pascale Nivelle, a rendu visite à cet écrivain dont le livre sur un village du Henan ravagé par le sida a été interdit. Il dénonce l'autocensure que pratiquent, selon lui, nombre d'écrivains en Chine. Cet article complète bien la vidéo sur cet écrivain, déjà référencée sur notre blog. (N.D.)

Dans le numéro de février du Magazine littéraire, Pierre Haski revient sur le Rêve du village des Ding 《丁莊夢》qu'il a déjà signalé dans son blog.

jeudi 8 mars 2007

Annual Meeting of the AAS


Après Chicago en 2001, Washington en 2002, New York en 2003, Chicago à nouveau en 2005 et San Francisco en 2006, c'est Boston (Mass.) qui accueille le congrès annuel de l'Association for Asian Studies [Ann Arbor, Michigan (USA)]. L'événement - le 59ème du genre -, est un moment important pour la communauté scientifique internationale dévouée à l'étude de l'Asie. Il est "devoted to planned programs of scholarly papers, roundtable discussions and panel sessions on a wide range of problems in research and teaching, and on Asian affairs in general."

En tout, ce seront quelque 228 micro-colloques de deux heures réunissant sous la houlette d'un(e) président(e) de séance et d'un ou plusieurs "discussants", qui vont se tenir entre le 22 mars et le 25 mars. Le programme détaillé est un document de 41 pages au format pdf, accessible à partir du site de l'AAS. Voici un aperçu des (rares) sessions consacrées à la littérature chinoise :
SESSION 38. Citation, Allusion and Intertexuality in Medieval Chinese Literature
Chaired by Pauline Yu, American Council of Learned Societies. Tao Yuanming’s Citations of the Zhuangzi in Context, Wendy Swartz, Columbia University ; Authority and Performance: The Qin Cao Tradition. Do You See What I See? Intertextual Landscape and the Formation of the Tang Lyric Subject, Paula Varsano, University of California, Berkeley. Discussant: David C. Schaberg, University of California, Los Angeles

SESSION 59. Animal and the Human Other in Contemporary Asian Media and Literature
Chaired by Steven L. Riep, Brigham Young University. Bugs from the Nether World: Animals in Three Contemporary Chinese Stories, Hua Li, University of British Columbia ; Woman-Animal Trope in Contemporary Fiction and Film across the Taiwan Strait, Chia-ju Chang, Trinity University ; Ecovisions: Documenting Animals in Recent Ethnographic Film, Anat Pick, University of East London ; Farmwife, Paper-cut, and Wolf: An Ecofeminist Reading of Jia Pingwa’s Ku Mairong, Qingqi Wei, University of Nevada, Reno. Discussant: Steven L. Riep, Brigham Young University


SESSION 82. The Dao That Ban Be Spoken Of: Rereading the Laozi
Chaired by Edward G. Slingerland, University of British Columbia. Linguistic Assimilation and Conceptual Focusing: Textual Transformation of the Laozi in Two Millennia, Xiaogan Liu, Chinese University of Hong Kong ; Anaphors or Cataphors? A Discussion of the Two Qi’ Graphs, Gil Raz, Dartmouth College ; Laozi as A Military Strategy Book: An Alternative Tradition, Ping Zhang, Tel Aviv University ; Is the Laozi a Daoist Text? Exploring the Notion of School Affiliation through Qing Period Commentaries, Ori Sela, Princeton University. Discussant: Edward G. Slingerland, University of British Columbia


SESSION 224. Across Invisible Divides in Chinese Fiction Studies
Chaired by Ming Dong Gu, Rhodes College. The Chinese Fictional Canon Reconsidered: The View from European Book Acquisitions, 1720-1860, Patricia A. Sieber, Ohio State University ; Placing the “Popular” Novel in the Qing, Margaret Baptist Wan, University of Utah ; Lu Xun’s Old Tales Retold: Modernist Experiments with Border Crossing, Ming Dong Gu, Rhodes College. Discussant: Rania Huntington, University of Illinois, Urbana-Champaign

SESSION 226. Localizing the World: A Question of Change in the Late Qing and Early Republican Chinese Fiction. Chaired by Feng-ying Ming, California State University, Long Beach. The Society Will Not be Made Better by Novels?: Bao Tainxiao’s Novels, Connoisseurship, and Contradictions, Feng-ying Ming, California State University, Long Beach ; Excessive Feelings and Making of Sentimental Power in Lin Shu’s Translation of Novel of Sentiment, Li Li, University of California, Los Angeles ; Inscription and Reinscription of Heroic Subjectivity in Su Manshu’s Fiction, Makiko Mori, University of California, Los Angeles ; Gender and Politics in Utopian Narrative from the Late Qing to the Early Republic, Lianfen Yang, Beijing University. Discussant: Grace S. Fong, McGill University.
Même si la littérature n'est pas une de ses priorités, gageons que cette édition sera aussi réussie et enrichissante que les précédentes dont on peut se faire une idée en parcourant - à partir d'ici - les résumés des interventions données depuis 1995.

Le lieu de réception est - n'en doutons pas - à la hauteur de l'importance de l'événement. Il est suffisamment spacieux pour accueillir un bon millier de congressistes et plus d'une centaines d'exposants : centre de recherche, institutions universitaires et maisons d'éditions. Ce sera l'occasion de présenter une masse assez impressionnante d'ouvrages qu'on découvrira en France dans les mois à venir.

Pour conclure cette présentation très sommaire de cette manifestation monumentale présidée par Anand Yang, j'encourage ceux pour qui tout ce qui touche à l'Asie est précieux, à visiter le site de l'AAS, lequel s'apprête à faire peau neuve (voir l'illustration ci-dessus), et je rappelle que l'AAS édite le Journal of Asian Studies dont le volume 66:1 (Février 2007) "will be the first to be published under the Cambridge University Press imprint—and the first to be published simultaneously in an online format offering full-text PDF and HTML articles". (PK)

vendredi 2 mars 2007

Mo Yan au top du Top 200

Une nouvelle qui devrait faire plaisir à Liliane & Noël Dutrait, autant qu'à Mo Yan : Beaux seins, belles fesses (Le Seuil, 2004) trône - en ce 2 mars 2007- en deuxième position du "top des 200 livres les plus consultés par les lecteurs d'Evene, un classement réalisé en direct et qui révèle la tendance Evene Livres du moment", et ceci juste derrière le Da Vinci Code ! Evene.fr est un portail commercial qui affiche bien fort son ambition d'offrir à ses visiteurs "toute la culture". Il s'adresse ainsi au plus grand nombre. Il est donc satisfaisant de trouver un roman chinois dans cette liste, même si c'est le seul des 200 qui la constituent.

Le moteur de recherche interne du site réserve également quelques plaisantes surprises. Restons-en à la rubrique "Livres", sans passer par la case "Mon roman". Si on lui soumet le mot "chinois", on obtient (du moins en ce début mars) une liste de 182 livres dont le dernier est Le cabinet chinois de Francis de Miomandre (1880-1959) paru en 1936 et depuis longtemps indisponible. Le premier de cette cordée hasardeuse est Nouilles chinoises, le roman de Ma Jian (1953-), traduit de l’anglais par Constance de Saint-Mont (Flammarion, 2006, 240 p.), dont est donnée (en pâture) la première phrase : « Le bureau donne sur la fenêtre d'une cuisine de l'immeuble d'en face. » On peut, comme pour chaque ouvrage traité, consulter un relevé de jugements critiques - tirés de la presse ou sortis de l'esprit d'internautes en mal de tribune- ainsi qu'une biographie de l'auteur. Pour Mo Yan, pour lequel figurent trois ouvrages en plus de Beaux seins, belles fesses, c'est ici ; pour Ma Jian, c'est . On a même droit à une citation (non référencée) de ce dernier : « La Chine est comme une vieille boîte, prête à éclater de tous les côtés. »

Pour conclure : l'interrogation avec "Beaux seins, belles fesses" conduit à une page fournissant outre un lien vers l'ouvrage en question et un autre vers son auteur, une liste de "termes connexes" que chacun pourra explorer selon sa fantaisie et selon son appétit. La voici :
derrière, cul, postérieur, croupe, fondement, pétard, cuisse, derche, hanche, joufflu, lune, meule, miche, mouille, noix, panier, prose, séant, joli, admirable, magnifique, superbe, délicieux, gracieux, harmonieux, merveilleux, parfait, splendide, clair, limpide, radieux, serein
En glissant de lien en lien, on peut tomber sur la liste complémentaire suivante :
poitrine, sein, nichons, poitrine, robert, téton, mamelle, entrailles, ventre, coeur, intérieur, milieu, centre, ....
Certains termes (à vous de trouver lesquels) renvoient à notre point de départ - Mo Yan dont une nouvelle traduction - La joie - est annoncée aux Editions Philippe Picquier. Affaire à suivre donc. Vive les convulsions de l'hypertexte et les titres porteurs. (PK)

Les intellectuels au XXIe siècle


Co-organisé par la Maison franco-japonaise, la Société japonaise de didactique du français et le comité pour la commémoration du 9e Congrès mondial de la FIPF, sous le haut patronage de l'ambassade de France au Japon, avec le concours du Journal Asahi, des Editions Fujiwara-shoten, Hakusuisha et Sichosha, le

Deuxième colloque international sur
la France et l’Asie de l’Est

se tiendra du mercredi 21 au vendredi 23 mars 2007
Auditorium de la Maison franco-japonaise,
3-9-25, Ebisu, Shibuya-ku, Tôkyô (Voir la carte ci-dessus)


Il a pour thème
Les intellectuels au XXIe siècle
La France, l’Asie de l’Est et le monde

21世紀の知識人 — フランス,東アジア,そして世界
Face à notre monde chaque jour un peu plus chaotique, l'esprit critique peut-il survivre ? Quelle stratégie appelle l'époque des nouveaux médias ? Venant de Chine, de Corée, de France, du Maroc et d'Haïti, artistes, écrivains ou universitaires débattront de façon plurielle de l'Asie de l'Est, de la France et du monde.
Ce colloque accueillera les 23 intervenants suivants
* Mercredi 21 mars (10 h – 18 h 15)
o Jacques JULLIARD, EHESS
o MIURA Masashi, critique littéraire
o DONG Qiang, Université de Pékin
o CHO Byun-Joon, Université Inha
o WATANABE Kazutami, Université Rikkyô
o Noël DUTRAIT, Université de Provence
o CHEN Danqing, peintre
o KO Un, poète

* Jeudi 22 mars (10 h 30 – 18 h 15)
o Abdelkébir KHATIBI, écrivain
o Jean-Claude FIGNOLÉ, écrivain
o Daniel MAXIMIN, écrivain
o Christophe PROCHASSON, EHESS
o Gisèle SAPIRO, CNRS
o ARITA Hideya, Université Seijô
o GU Zheng, Université Fudan
o MINATO Chihiro, photographe
o KOBAYASHI Kolin, artiste

* Vendredi 23 mars (10 h 30 – 17 h 30)
o SHIRAISHI Yoshiharu, Université Sophia
o YABU Shiro, Anti-Capitalism Action
o CHOI Won-shik, critique littéraire
o Pierre LÉVY, Université d'Ottawa
o Serge HALIMI, Le Monde Diplomatique
o UENO Toshiya, Université Wakô
Noël Dutrait [ノエル・デュトレ (プロヴァンス大学) ] y parlera de "Gao Xingjian, un intellectuel à la marge".

IIAS Newsletter


Le site de l'IIAS a récemment fait peau neuve. Il est encore plus facile que par le passé de s'orienter dans la masse d'informations mises à la disposition des chercheurs par cet Institut International d'Etudes Asiatiques, lequel se définit ainsi :
The International Institute for Asian Studies (IIAS) is a postdoctoral research centre based in Leiden and Amsterdam, the Netherlands. Our main objective is to encourage the interdisciplinary and comparative study of Asia and to promote national and international cooperation in the field. The institute focuses on the human and social sciences and on their interaction with other sciences. (Lire la suite ici)
L'IIAS édite une Newsletter dont la 43° édition vient de paraître (Leiden, Spring 2007, 40 pages). Son contenu - comme celui des 13 numéros précédents - a été mis en ligne, mais si vous éprouvez encore un certain plaisir à feuilleter une revue savante au format journal, n'hésitez plus à vous y abonner ; c'est gratuit et fort simple à partir d'ici.

Je vous recommande tout particulièrement dans la dernière livraison, intitulée "Comparative Intellectual Histories of Early Modern Asia", l'article de Benjamin A. Elman (Department of East Asian Studies and History, Princeton University), "Early Modern Classicism and Late Imperial China" (pp. 5-6), ainsi que le n° 40 dont le thème était : "The Art of Seduction" (PK)

dimanche 25 février 2007

The Case for Literature


Voici, à la veille de la sortie de l'ouvrage aux Etats-Unis (26/02/07), la notice diffusée par Yale University Press pour annoncer la publication de The Case for Literature de Gao Xingjian :
When Gao Xingjian was crowned Nobel Laureate in 2000, it was the first time in the hundred-year history of the Nobel Prize that this honor had been awarded to an author for a body of work written in Chinese. The same year, American readers embraced Mabel Lee’s translation of Gao’s lyrical and autobiographical novel Soul Mountain, making it a national bestseller. Gao’s plays, novels, and short fiction have won the Chinese expatriate an international following and a place among the world’s greatest living writers.

The bold and extraordinary essays in this volume—all beautifully translated by sinologist Mabel Lee—include Gao's Nobel Lecture (“The Case for Literature”), “Literature as Testimony: The Search for Truth,” “Cold Literature", “Literature and Metaphysics: About Soul Mountain,” and “The Necessity of Loneliness”, as well as other essays. These essays embody an argument for literature as a universal human endeavor rather than one defined and limited by national boundaries. Gao believes in the need for the writer to stand apart from collective movements, regardless of whether these are engineered by political parties or driven by economic or other forces not related to literature. This collection presents Gao's innovative ideas on aesthetics, and it constitutes the very kernel of his thinking on literary creation.
Le lecteur français peut déjà se faire une bonne idée du contenu de cet ouvrage grâce au Témoignage de la littérature (Traduit du chinois par Noël et Liliane Dutrait) paru en 2004 aux Editions du Seuil (159 pages) :
"Préface de l'auteur" (pp. 7-17).
"Ne pas avoir de -isme" (pp. 19-38)
"La littérature froide" (pp. 39-44)
"Littérature et "étude du mystère" : à propos de La Montagne de l'Âme" (pp. 45-78)
"Le chinois moderne et l'écriture littéraire" (pp. 79-108)
"La raison d'être de la littérature" (pp. 109-134)
"Le témoignage de la littérature - la recherche du réel" (pp. 135-158)

Nous aurons naturellement l'occasion de parler, ici, du travail de Mabel Lee et de The Case for Literature. Pour l'heure, je souhaite, à titre personnel et à ceux qui ont la chance de pouvoir en prendre, d'excellentes vacances, et vous donne rendez-vous début mars. (PK)