vendredi 21 janvier 2011

Le livre qui n’est pas encore

Pei-king, 28 février 1911. ― Je ne saurai donc rien de plus. Je n’insiste pas ; je me retire ... respectueusement d’ailleurs et à reculons, puisque le Protocole le veut ainsi, et qu’il s’agit du Palais Impérial, d’une audience qui ne fut pas donnée, et ne sera jamais accordée ...
C’est par cet aveu, ― ridicule ou diplomatique, selon l’accent qu’on lui prête, ― que je dois clore, avant de l’avoir mené bien loin, ce cahier dont j’espérais faire un livre. Le livre ne sera pas non plus. (Beau titre posthume à défaut d’un livre : « Le livre qui ne fut pas » !)

J’avais cru le tenir d’avance, plus « fini », plus vendable que n’importe quel roman patenté, plus compact que tout autre aggloméré de documents dits humains. Mieux qu’un récit imaginaire, il aurait eu, à chacun de ses bonds dans le réel, l’emprise de toute la magie enclose de ces murs..., où je n’entrerai pas.
On ne peut disconvenir que Pei-king ne soit un chef-d’œuvre de réalisation mystérieuse.
Tel est le début de René Leys, le roman improbable de Victor Segalen (1878-1919), roman posthume publié pour la première fois en 1922, soit trois ans après la mort de son auteur. « Un miraculeux accident », selon Pierre Ryckmans alias Simon Leys qui ajoute : « Livre de l’échec et de la dérision, il est aussi le plus fidèle reflet de l’expérience du poète, qui, cherchant à pénétrer dans une impénétrable « Cité interdite », ne réussit finalement qu’à se faire mener en bateau par un séduisant et pathétique fumiste. » ; livre depuis souvent réédité (notamment dans un beau coffret chez Chatelain-Julien, 1999) et traduit ; livre que François Mitterrand avait lu et aimé (voir l'extrait de l'émission Italiques du 13/01/1972, source INA, 3min57s. ), et qu'on peut feuilleter en ligne grâce à Gallica dans une édition datant de 1950 (Plon), livre, enfin, qu’on devrait retrouver un jour prochain dans les Œuvres complètes de Victor Segalen en 18 volumes annoncées aux Editions Honoré Champion. Le premier volume de ce monument à venir sera disponible en mars prochain ; il présentera (pour 75 €) La Grande Statuaire et les Premiers écrits sur l'art.


Cette promesse m’est connue par l’intermédiaire d’un tout nouveau blog que je tiens à vous signaler et que je vous invite à visiter sans tarder. Il est tenu par Philippe Postel, Maître de conférences à l’Université de Nantes, et qui, vous vous en souvenez sans doute, nous a fait l'amitié de venir à Aix-en-Provence parler à deux reprises des vieilles traductions françaises de romans chinois anciens (d'abord en mars, puis en octobre 2009). Ce blog, auquel je souhaite bon vent, est celui de l'Association Victor Segalen ; il a pour vocation de « présenter les événements récents concernant l'œuvre de Victor Segalen », son adresse est :
http://associationvictorsegalen6.blogspot.com/ ― n’oubliez pas de l’installer dans la liste de vos signets préférés. (P.K.)

1 commentaire:

Philippe Postel a dit…

Je remercie Pierre Kaser de faire ainsi une place au blog de l'Association Segalen. Juste une précision : La Grande Statutaire et Premiers Ecrits sur l'art formeront deux volumes distincts chez Honoré Champion.